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lundi 26 juin 2017

Donnez-leur une chance !

Dans toute bonne bibliothèque qui se respecte, un travail de désherbage est effectué sur les collections. Il ne faut pas imaginer les bibliothécaires à quatre pattes en train d'enlever de la mauvaise herbe entre les rayons. Il s'agit de réviser la collection soit en supprimant des documents qui seraient devenus obsolètes ou en mauvais état, soit en les transférant dans un autre dépôt plus approprié, soit en les donnant plus loin. Au final, ceci permet de redynamiser la collection, de la valoriser, de l'actualiser, de la rendre plus cohérente.

Dans notre bibliothèque, le libre accès commence sérieusement à saturer avec près de 18'000 partitions : les rayons se remplissent (env. 1'000 acquisitions par an) et forcément les lecteurs ont plus de peine à trouver leur bonheur parmi le grand nombre de documents qui s'accumulent. On passe donc en revue les sections qui sont les plus encombrées, on analyse chaque document pour voir si ceux qui sont moins empruntés pourraient être relégués dans un autre dépôt ou tout simplement éliminés (ce qui est plus rare dans notre cas).

A ce niveau, il est intéressant de constater que les grandes oeuvres du répertoire battent tous les records de prêt et conservent leur droit de rester sur les rayons du libre accès. Tandis que d'autres oeuvres sont des laissées-pour-compte, des méprisées, des oubliées, alors qu'elles mériteraient beaucoup mieux ! Pourquoi donc les musiciens s'obstinent à jouer toujours les mêmes quatuors, symphonies, concertos, maintes fois entendus, alors que le public (et eux-mêmes !) pourrait apprécier de découvrir de nouvelles mélodies, certes de compositeurs plus contemporains mais qui restent tout à fait audibles pour les oreilles sensibles.

A découvrir

Voici quelques suggestions de partitions méconnues, oubliées sur les rayons des quatuors à cordes, qui pourraient renouveler votre répertoire.

Arabian Waltz : for string quartet / Rabih Abou-Khalil 

Valse enjouée, pour quatuor à cordes classique, aux résonances orientales, avec des rythmes pas que ternaires (7/16, 5/8...), écrite en 1995 par le compositeur et joueur de oud libanais Rabih Abou-Khalil.

Arabian waltz, en version avec oud traditionnel 

String quartet no. 2 / Michael Nyman

Deuxième quatuor à cordes parmi les quatre (que nous possédons) écrits par le compositeur anglais Michael Nyman - plus connu pour ses musiques de film (La leçon de piano, Bienvenue à Gattaca...) - dans son style de prédilection de  musique minimaliste et répétitive.


Script / William Sheller

On le sait moins, mais l'auteur d'Un homme heureux et des Filles de l'aurore a également composé des concertos, symphonies et aussi de beaux quatuors à cordes, comme Script. Ne manquez pas également dans la même idée Foehn et Ondis.

On réserve déjà nos places pour venir vous écouter !

Fabienne

lundi 19 juin 2017

Bibliothèque en fête

Pour la 26ème édition de la Fête de la musique à Genève, la bibliothèque accueille à nouveau en ses murs une série de concerts. Ce sont quatre formations, du duo au quatuor, qui animeront musicalement l'après-midi et le début de soirée du samedi 24 juin 2017.

Cette année, nous avons opté pour une thématique autour de la voix. Chaque ensemble fera vibrer ses cordes vocales (et de violoncelle, violon et guitares également !), que ce soit sur une note jazzy, ou avec une touche plus folklorique.

 

15h : Zatar   
Francesco Bartoletti : violoncelle, Soraya Berent : chant, Joël Musy : saxophones, Nicolas Lambert : guitare

Chants tziganes, grecs, pugliese, échos du Liban, romances macédoniennes, répertoire classique ouvert à l'improvisation… Zatar arrange, compose avec ces influences, et distille un atypique « ethnojazz de chambre ».

16h30 : Julien Pinol - Erida Bega
Julien Pinol : guitare, chant, maracas, Erida Bega : violon, chant, tambourin

Ces deux musiciens, aux parcours fort variés, plongent principalement leur auditoire dans le répertoire américain des années 20 et 30. La poésie sonore se fait sans le grand orchestre habituel qui accompagnait ces chansons ; ici, juste chants, violon, guitare et autres.

18h : Trio Lafken et les instruments des Andes
Pancho Gonzalez, Christian Goza, David Valdivia

Le trio de musiciens chiliens va accompagner les textes des divers compositeurs et compositrices du vaste continent d’Amérique du sud, des Caraïbes et d’Amérique centrale avec : des instruments à cordes (cuatro, tiple, charango, guitare, guitare basse), des instruments à vent (quenas, zampoñas, rodador) et quelques percussions (claves, güiro, bombo legüero, maracas). Un bref parcours de Patagonie aux plaines des Llanos Venezuela, passage en Colombie, au Nicaragua, et à Cuba.


19h30 : Napolincanta
Oscar Mancino : chant, Sylviane Baillif-Beux : piano, Alain Delabre : trompette-piccolo, Invitée surprise

En juxtaposant le musical et le théâtral, le sublime et le comique, le spectacle de chansons napolitaines "Napolincanta" invite le spectateur à un voyage enchanteur, au cours duquel des airs familiers nous reviennent à l'oreille et d'autres chansons, plus nouvelles nous surprennent.


En parallèle de ces concerts, vous pourrez également admirer en vitrine les masques d'Agnès de Crousaz représentant les personnages d'opéra de La flûte enchantée, La belle Hélène, Madame Butterfly et Turandot.


 
Papageno


Bienvenue à tous pour ce voyage (en)chanté !

Fabienne

lundi 12 juin 2017

Tobias Richter versus Aviel Cahn


Tobias Richter qui dirige le Grand Théâtre de Genève depuis 2009 avait annoncé dès l'automne dernier son désir de prendre sa retraite en juin 2019, laissant assez de temps pour le recrutement de son successeur. C'est chose faite désormais, avec la nomination de Aviel Cahn à la tête de l'institution lyrique genevoise, qui prendra ses fonctions en juillet 2019. 

Directeur de l'Opéra des Flandres depuis 2009, Aviel Cahn défend une vision engagée. Juriste et mélomane à la fois, il est aussi décrit comme un limier redoutable. Son parcours est impressionnant : né à Zurich, il quitte la Suisse à 26 ans pour gérer les relations internationales de l’Orchestre symphonique de Beijing, puis se charge du casting à l’Opéra de Finlande avant de diriger l’Opéra de Berne et l'Orchestre de chambre de Zurich. À 34 ans, il est nommé directeur de l’Opéra des Flandres à Anvers et Gand.

Tobias Richter quant à lui fait la couverture du numéro de juin de la revue Scènes magazine. Pour sa prochaine - et donc avant dernière - saison à la tête de l'institution lyrique genevoise, il est interviewé sur les choix de sa programmation. Elle doit tenir compte des contraintes du théâtre éphémère de l'Opéra des Nations, une situation qui ne lui déplait pas, car la simplicité du cadre scénique lui donne des idées. Telle cette trilogie de Figaro qui ouvrira la saison : trois opéras autour du très populaire personnage de Beaumarchais seront donnés sur trois jours. Ainsi la scène doit pouvoir s'adapter facilement aux différentes intrigues du Barbier de Séville de Rossini, des Noces de Figaro de Mozart et de Figaro gets a divorce, un opéra contemporain d'Elena Langer. 

Encore durablement émerveillée par le précédent cycle qu'il nous avait concocté autour de la tétralogie de Wagner en 2014, je me réjouis fort de cette originale initiative. Cette fois-ci ce sera sur un mode plus léger !

Autre particularité de la saison 2017-2018 : le directeur se change en metteur en scène. C'est la pièce centrale du triptyque - Les Noces de Figaro de Mozart - que Tobias Richter mettra en scène, fort de sa carrière en Europe, où il a monté de nombreux spectacles.

 Tobias Richter à l'Opéra des Nations. Image Keystone

Retour dans les murs du vénérable bâtiment rénové de la Place Neuve dès septembre 2018 : Tobias Richter y programmera son ultime saison puis passera le relais à Aviel Cahn... une nouvelle étape à composer !


Disponibilité Noces de figaro
Disponibilité Barbier de Séville

 Tullia

lundi 5 juin 2017

Russe (la tension des aimants) : dernier volet

Manuscrit du début de la 7e symphonie
"Leningrad", Ms, RUS-Mcm

Passer de la 7e sonate de Prokofiev écrite en 1942 à la 7e symphonie de Chostakovitch créée la même année, c'est ce que propose Claudio Chiacchiari entre l'atelier consacré à Prokofiev et le dernier volet de ses ateliers russes. Sans doute que l'analyse s'arrêtera longuement sur le premier mouvement et le thème dit de "l'invasion".

Si la 7e symphonie de Chostokovitch est l'oeuvre la plus connue du compositeur russe, sa renommée mondiale est liée aux différents concerts dirigés par Toscanini et l'Orchestre symphonique de la NBC en 1942. A Paris, le musicologue et critique Antoine Goléa découvrit cette symphonie en 1945. Voici ses mots, tirés de la Revue Esprit, no 111 :
Mais impossible de résister au souffle qui anime, sans défaillance presque l'oeuvre entière. A peine, dans le troisième mouvement, peut-on trouver quelques longueurs. L'ensemble, on l'aurait écouté volontiers une deuxième fois, tout de suite après l'indescriptible triomphe qui accueillit Münch et son orchestre.
Mais bien plus célèbre encore, car elle a fait partie de l'Histoire avec un grand H. Peu d'œuvres musicales peuvent ainsi s'identifier à un événement historique. Créée pendant le siège de Leningrad, elle fut un acte de résistance à l'occupation allemande. Les quatre mouvements avaient initialement été pensés ainsi: La guerre, Souvenirs, Les grands espaces de ma patrie, La victoire. De plus, la dédicace, selon les Mémoires du compositeur s'adresse aussi aux purges du régime stalinien qui ont précédé la guerre. Plus proche de nous, seule peut-être La muette de Portici d'Auber pourrait avoir ce poids historique, puisque c'est lors d'une représentation au Théâtre de la Monnaie à Bruxelles en août 1830 que les bourgeois se soulevèrent et participèrent aux mouvements qui donneront lieu à la création de la Belgique.

La symphonie de Leningrad, le siège de la ville reste un sujet qui ne cesse d'alimenter l'imagination des romanciers. Le roman signé Sarah Quigley est un exemple parmi d'autres:
Chostakovitch contempla une longue rayure sur le plateau de la table où il était aussi. "Je n'arrive pas à croire que j'aie été refoulé. De quel droit ?
 Peut-être ne tiennent-ils pas à voir l'un des beaux fleurons de la Russie réduit en miettes ? suggéra Sollertinski.
Le compositeur ôta ses lunettes et fixa la une de la Pravda qu'avait apportée son ami. Les caractères se brouillaient et glissaient au bord de la cornée. "Juste à cause de ma vision" maugréa-t-il. Pl...év...
C'était comme vouloir attraper des ronds de fumée. Dès qu'il rechaussa ses lunettes sur son nez, les lettres s'alignèrent en rangées bien nettes et lisibles. Plan d'évacuation des enfants et des personnes âgées de Leningrad.
 Il repoussa le journal.
"Maintenant que la moitié de la ville est partie, l'autre moitié devra se battre. Je vais réessayer de m'engager. Ils n'auront quand même pas le front de me refuser une seconde fois.
 Ce que tu peux être bête ! Tu te vois te balader avec un fusil ? Tu serais incapable de tirer sur un omnibus à trois mètres de distance, à plus forte raison sur un Allemand. Laisse donc les citoyens mobilisés faire leur boulot pendant que nous ferons le nôtre. Les intellectuels peuvent accomplir quantité de choses en situation de conflit, conclut-il en avalant une grand lampée de cognac.
[Eté 1941, pp 156-157] 

Enfin, quelques émissions sur France Musique ont été consacrées à Dmitri Chostakovitch à Léningrad en 1942, l'occasion d'en savoir plus si vous ratez l'atelier du 10 juin - seules des places l'après-midi sont encore disponibles, l'atelier du matin étant déjà complet.



Chostakovitch en costume de pompier en 1942
lors de la création de la symphonie à Leningrad

Disponibilité
Disponibilité (enregistrement via Naxos)
Disponibilité (roman)

Muriel